Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/74

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tement, auſſi fidèlement ſervie. Au moment où cette identité ceſſe, le déſordre s’introduit. Ce n’eſt plus une armée qui tend au même but : ce ſont des officiers iſolés, des ſoldats séparés qui s’abandonnent à des deſſeins particuliers. Cette ſubordination, qui lie cent mille têtes, deux cens mille bras à un même général, eſt la qualité principale qui diſtingue nos guerriers modernes des guerriers anciens. Chez ces derniers, chacun ſe déſignoit ſon ennemi, & alloit le défier au milieu de la mêlée. Un combat n’étoit qu’un grand nombre de duels exécutés en même tems ſur un champ de bataille. Il n’en eſt pas ainſi de nos jours. Ce ſont de profondes, larges & denſes maſſes d’hommes alignés & preſſés, ſe mouvant en tout ſens comme un ſeul. Autrefois, c’étoit un duel d’homme à homme ; à préſent, c’eſt un duel de maſſe à maſſe. Le moindre défaut de ſubordination ameneroit la confuſion, & la confuſion un horrible maſſacre & une défaite humiliante.

L’éloignement qu’ont les ſauvages du Canada pour tout ce qui peut gêner leur indépendance, ne les a pas empêchés d’aper-