Page:Raynaud - À l’ombre de mes dieux, 1924.djvu/38

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.


Je songe avec angoisse à la vitre assombrie
Où tous les instruments de chirurgie ont l’air,
Tant ils luisent, de fins joyaux d’orfèvrerie
Impatients de mordre et d’entrer dans la chair ;

Je songe aux cœurs blessés, au douloureux murmure
Qui monte, à l’hôpital, des lits multipliés,
Tandis qu’aux murs, témoin de la détresse obscure,
Règne, impuissante image, un dieu crucifié.

Je sais qu’il est des coups de telle violence
Et des convulsions si fortes sur les draps,
Que la Mort apparaît comme une délivrance
Et que l’homme s’y fraie un chemin de son bras.

Mais qu’importe après tout ? puisque l’émoi de l’heure
Nous fait participer du divin tremblement,
Ô mon âme, oublions que sa magie est leurre,
Et rendons grâce au Ciel qui nous vaut ce moment.