Page:Raynaud - À l’ombre de mes dieux, 1924.djvu/43

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Et vous leur ressemblez quand l’Automne mystique
Les fait choir, feuille à feuille, au versant des talus ;
Quand, sur eux, passe, aux fins de jour mélancolique,
La bénédiction d’un suprême Angélus ;
Soit quand l’hiver blafard, noyé de brume, applique
Sur le rouge horizon leurs grands squelettes nus.


II


Arbres, si j’entreprends de chanter vos louanges,
Que je retienne un peu du bruit de vos concerts !
Mettez, aérien orchestre aux voix étranges,
Tout votre emportement lyrique dans mes vers
Pour que, vivifiés, comme au soir des vendanges,
L’ivresse de Cybèle y respire à travers !

Parfois, un brusque éclair vous frappe et vous bouscule,
Vous êtes, comme l’Homme, en proie aux éléments.
Je sais vos gestes fous déchaînés par les vents,
Et vos torpeurs et vos tragiques crépuscules,
Et ce que votre feuille aux riches vestibules,
Met d’extase bleuâtre et de souffles fervents.