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GÉOGRAPHIE.

étonné les anciens, comme il étonne aujourd’hui les voyageurs que le chemin de fer mène, en longues lignes droites d’Arles, ville morte, à Marseille, cité vivante. Dans son Prométhée enchaîné, le poète aux vers d’airain, le tragique Eschyle, nous raconte comment Hercule rencontra dans ces vastes champs l’armée des Ligures : le héros n’avait pas l’arc infaillible et les flèches mortelles ; il succombait, quand le maître des hommes et des dieux, son divin père, fit tomber du ciel une pluie de cailloux dont Hercule aussitôt lapida ses ennemis. Ce sont ces cailloux célestes qui couvrent la Crau.

La Crau.

En hiver, au printemps, s’il tombe un peu de neige, et si le mistral passe en déchirant les airs, la plaine des pierres peut un instant ressembler à la Sibérie ; mais en été, c’est un Sahara qui dévore ; le véridique soleil y devient le père du mensonge, et dans l’air embrase qui vibre le mirage fait flotter des lacs transparents. Dans cette