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FRANCE.

Perpignan à Barcelone, est à 290 mètres d’altitude ; une citadelle y défend l’entrée de la France, Bellegarde, en partie taillée dans la roche, sur un cône, à 420 mètres au-dessus de la Méditerranée.

Ce ne sont pas là toutes Les Pyrénées : outre le large revers espagnol du versant français, une haute sierra dentelée s’élève en terre castillane qui, sous différents noms pompeux, continue la chaîne française-espagnole jusqu’à la frontière du Portugal, donnant de la sorte aux « Montes Pirineos » une longueur de 1 400 à 1 500 kilomètres sur plus de 12 millions d’hectares. Elle couvre le Guipúzcoa, la Biscaye et l’Alava, terres où la langue des Escualdunacs vibre encore, l’Asturie de Santander, l’Asturie d’Oviédo, « berceau de la triomphante Espagne, » et la Galice dont elle embrasse les rias, qui sont des estuaires, des fiords, avec des ports tels que l’Europe n’en a pas de meilleurs. C’est elle que le chemin de fer d’Hendaye à Madrid franchit entre Saint-Sébastien et Vitoria, par déblais, remblais et tunnels, au-dessus de torrents teints de sang espagnol et basque par les cuchilladas[1] de la guerre carliste.


4o Plateau de Lannemezan. Landes. — En aval de Sarrancolin, les monts qui contiennent la rive gauche de la Neste, torrent magnifique, s’abaissent tout à coup : aux neiges éclatantes où passerait l’ombre du condor s’il y avait des condors en France, aux rocs, aux croupes, aux précipices, aux pics baignés par le lac transparent d’en haut, succède au nord un plateau de 506 à 600 mètres d’altitude, pauvre, humble, laid, fendu en vallons par les eaux, durement sabré par les vents qui accourent du nord ou refluent des monts du midi.

C’est le plateau de Lannemezan, beau dans sa laideur par l’apparition violette, blanche et bleue des Pyrénées, qui se lèvent au sud, avec une prodigieuse gran-

  1. Coups de couteau, coups de sabre, combats à la baïonnette.