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GÉOGRAPHIE.

Comme le rocheux littoral basque, la côte montueuse du Roussillon est fort courte. Son meilleur abri, Port-Vendres, à la fois sûr et profond, est le port français le moins éloigné d’Alger et d’Oran ; aussi peut-il compter sur l’avenir.

Bientôt les rochers, les anses, les lignes à chaque instant brisées font place à des sables, littoral droit qu’ouvrent trois petits fleuves pyrénéens non navigables, mais très précieux pour l’irrigation des plaines brûlées du soleil, battues des vents, où ils entrent à l’issue des gorges de la montagne : ces plaines ont été conquises en partie par leurs alluvions sur la mer.

Le Tech a des inondations redoutables : on l’a surnommé le Justicier de la contrée. Né dans de rudes montagnes de 2 000 à 2 500 mètres, au-dessus de Prats-de-Mollo, petite place de guerre, il descend bruyamment les gorges du Vallespire, dont le nom fait image : c’est Vallis aspera ou l’âpre Vallée ; il passe à Sainte-Amélie, ville thermale et ville d’hiver, puis sous l’arche du vieux pont de Céret, bâti par le Diable en une seule nuit, comme le peuple le raconte de tant d’autres ponts dont il admire la hardiesse ou la hauteur. Arrivé dans la plaine, il coule au milieu des osiers et des saules, parmi joncs et roseaux, et laisse à gauche Elne, qu’il effleurait autrefois, quand, ainsi que cette ville, il s’appelait du nom basque d’Iliberri, au temps où les Escualdunacs n’allaient pas seulement « desde Bayona á Bayona », de Bayonne en France à Bayonne en Galice, mais régnaient aussi de l’Océan à la Méditerranée, entre Pyrénées et Garonne, sur ce qui est aujourd’hui Béarn, Gascogne, Languedoc et Roussillon. Le Tech n’a guère plus de 80 kilomètres.

Entre le Tech et la Têt, l’étang de Saint-Nazaire (1 200 hectares) reçoit le Réart, jolie rivière qui vient du pays des Aspres ; il communique avec la mer par un grau, c’est-à-dire par un chenal perçant un cordon aréneux que submerge en partie le flot de tempête. Quant à la Têt,