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GÉOGRAPHIE.

saire : ils sont, en effet, très petits ; le lac de Bord emplit un vieux cratère ; le lac de Saint-Andéol a 2 400 mètres de tour ou un peu moins ; le lac des Saliens verse le torrent de la cascade de la Roque ; le lac de Souvérols se nomme, et c’est tout.

Au sud, au sud-ouest, les torrents d’Aubrac, faits du ruissellement des pelouses, quittent précipitamment le silence et la paix des lieux supérieurs ; par de profondes déchirures, entre des orgues, des roches, des talus oppresseurs, ils tombent en quelques heures à la rive droite du Lot. À l’est, au nord, sur le versant de la Truyère, la pente est moindre, les sources ayant devant elles une route plus longue avant d’atteindre la ville d’Entraygues, qui est le rendez-vous de la Truyère et du Lot. De ce côté-là s’étend la Sibérie d’Aubrac : Sibérie en hiver seulement, car son herbe savoureuse fait en été les délices de 30 000 vaches et de 40 000 moutons venus du Bas-Languedoc pour demander aux prairies des montagnes le funeste épanouissement de chair qui les vouera plus vite au couteau des égorgeurs.

Sur ce versant septentrional, un nuage de vapeur plane au-dessus du vallon d’un petit torrent qui court à la Truyère ; il signale Chaudes-Aigues, en français les Eaux-Chaudes, lieu bien nommé : des sources thermales — de 57° à 81° — y jaillissent ; amenées par des canaux dans les maisons, elles y distribuent en hiver une température de 18, de 20, et même de 26 degrés ; si bien qu’il règne en ce bas-fond de l’Aubrac un air doux et mou bien supérieur au climat normal d’une ville sise en pleine montagne sous des cieux neigeux à 650 mètres d’altitude, dans un vallon tourné vers le nord.

Ces eaux ne sont pas seulement thermales, elles sont aussi minérales : elles consolent, souvent même elles guérissent des rhumatisants, des gastralgiques et autres tristes dolents ; leur renom grandit, et sans doute elles attireront des visiteurs aux monts d’Aubrac, terre inconnue, presque déserte, où il n’y a que peu de hameaux et des