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GÉOGRAPHIE.

Chine. C’est donc, et de beaucoup, le plus grand de tous nos fleuves ; ce serait le plus précieux s’il reflétait des cieux froids, comme l’altière Québec, ou des cieux éclatants et chauds mais secs, comme la blanche Alger, la haute Constantine et la joyeuse Oran.

Le riz, toutes les plantes amies du soleil et de l’eau, viennent à merveille dans les alluvions de la Cochinchine, où les exondances périodiques du Mécong et autres rivières ou ruisseaux réparent chaque année le sol par le dépôt des crues. Les terres hautes, à l’est et au nord de Saigon, ont peu d’étendue et leurs plus hautes cimes n’ont même pas 4 000 mètres ; ces petits monts, qu’habillent des forêts, ont pour maître sommet le Nui-Ba-Dèn ou Dame Noire (883 mètres) ; ils se nouent à la chaîne littorale de l’Annam, laquelle s’élève entre le val du Mécong et le rivage de Hué[1].

Des 1 500 000 à 1 600 000 habitants de la Cochinchine, plus de 1 350 000 sont des Cochinchinois, plus de 100 000 des Cambodgiens, 40 000 des Chinois, 10 000 des Malais.

Les Cochinchinois descendent de colons et de mendiants annamites, mêlés à des Chinois, que l’empereur d’Annam interna dans le delta du Mécong, alors occupé par des Cambodgiens. Annamites, Chinois, Cambodgiens étant plus ou moins la même race d’hommes, avec des idiomes de même nature, le brassage de ces éléments ne fut point difficile, et les Cochinchinois forment un peuple homogène. Ce sont des gens de taille courte, de membres menus, de visage plat, de teint basané, d’yeux obliques et bridés ; en un mot des « Jaunes », pétris de qualités et de vices, comme toute autre argile humaine : on leur reconnaît l’intelligence, le don de l’imitation, la sobriété, l’amour du travail, les vertus de famille ; on leur reproche le mensonge, la duplicité, l’esprit sans profondeur, l’instinct de la routine, la pusillanimité (toutefois ils ne craignent pas la mort). Ils parlent un

  1. Résidence de l’empereur d’Annam, notre vassal.