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GÉOGRAPHIE.

reçoit la Jarmagne et que reçoit la Moselle : long de 2 kilomètres, mais n’ayant que 350 à 500 mètres de largeur, il ressemble à un fleuve de 50 mètres de profondeur qui coulerait entre des versants boisés ; on lui donne environ 75 hectares. Plus encaissé, plus sérieux, plus sombre de sapins que le lac de Gérardmer, il est moins sévère, moins noir que le lac de Retournemer : celui-ci, avec ses 6 hectares, n’est qu’un étang profond, que traverse la Vologne, que domine le Haut-d’Honeck ; il faut les sourires des plus beaux jours pour égayer son entonnoir : pendant la saison mauvaise, sous le vent, sous les pluies et la neige, c’est un plancher de glace, ou c’est une eau lugubre où flottent les aiguilles du sapin et les feuilles du hêtre.

Le Haut-d’Honeck est maintenant le monarque de nos Vosges : ayant 1 366 mètres, il ne le cède au Ballon de Soultz que de 60 mètres, pas même la hauteur des tours de Notre-Dame, ce qui en fait le second sommet de toute la chaîne. La Vologne en sort. Son nom véritable, purement allemand, Hoheneck, signifie la Haute-Pointe. Plus au sud, le Ballon d’Alsace a 1 257 mètres : on pourrait aussi bien l’appeler Ballon de Lorraine ou Ballon de Franche-Comté, car le département des Vosges et celui de la Haute-Saône s’y appuient comme l’ancien département du Haut-Rhin. Le Ballon de Servance, vers les sources de l’Ognon, s’élève encore à 1 189 mètres, le Ballon de Lure ou Planche-des-Belles-Filles à 1 150 ; mais à partir de ce dernier sommet la chaîne s’abaisse rapidement ; elle va s’aplatir sur des terres basses de la Trouée de Belfort, dépression qui n’a que 320 mètres d’altitude.

La trouée de Belfort, point très vulnérable, est un passage naturel pour les armées, les voies de fer, de terre et d’eau entre les versants du Rhône et du Rhin. Le canal du Rhône au Rhin en profite pour passer du bassin du Doubs, rivière suisse et comtoise, dans le bassin de l’Ill, rivière alsacienne, longtemps parallèle au Rhin qui finit par la boire ; le chemin de fer de Paris à Bâle emprunte égale-