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GÉOGRAPHIE.


CHAPITRE V

COLONIES D’AMÉRIQUE


1o Saint-Pierre et Miquelon. — Nous, les anciens dominateurs, explorateurs et colonisateurs de l’Amérique du Nord, nous n’y possédons plus que Saint-Pierre et Miquelon, granits, sables et tourbe dans le brouillard et l’embrun, sur une mer prodigieusement libérale en morues.

Près de l’île anglaise de Terre-Neuve et du banc de Saint-Pierre, non loin du grand banc de Terre-Neuve, sous le 47e degré de latitude, à 6 670 kilomètres de Brest, le drapeau des Trois Couleurs flotte humblement sur ces 21 000 hectares, débris d’un empire vingt fois plus grand que la France.

Saint-Pierre, fort petite (2 600 hectares), a pour annexe l’île aux Chiens. Sur ce sombre îlot de granit, qu’assiège une vague orageuse, vivent plus des 4/5 des habitants de l’archipel.

Miquelon (18 423 hectares) comprend deux îles granitiques pleines de tourbe : la Grande Miquelon et la Petite Miquelon ou Langlade, réunies depuis 1783 par une langue de sable.

Ces trois îles réduites à deux nous sont précieuses pendant la saison de la morue. Tout le temps qu’on pêche, qu’on sale ces multitudes, sur une mer qui nourrit plus d’hommes que tel vaste royaume, Saint-Pierre est un grand rendez-vous de navires français ; car nous envoyons à la morue, surtout de Bretagne et de Normandie, 300 vaisseaux et 15 000 matelots par an.

C’est une colonie salubre que ces roches où les plus inexorables ennemis du nom français nous permettent