Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/22

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créer un monde à leur image, ils n’ont pas su faire de la nature un grand jardin de mandarin chinois avec des arbres torturés en forme de monstres et de nains, des bassins taillés en figures géométriques et des rocailles au dernier goût ; la terre, par la magnificence de ses horizons, la fraîcheur de ses bois, la limpidité de ses sources, est restée la grande éducatrice, et n’a cessé de rappeler les nations à l’harmonie et à la recherche de la liberté. Telle montagne dont les neiges ou les glaces se montrent en plein ciel au-dessus des nuages, telle grande forêt dans laquelle mugit le vent, tel ruisseau qui coule dans les prairies ont souvent plus fait que des armées pour le salut d’un peuple. C’est là ce qu’ont senti les Basques, ces nobles descendants des Ibères, nos aïeux : afin de rester libres et fiers, ils ont toujours bâti leurs demeures au bord des fontaines, à l’ombre des grands arbres, et plus encore que leur courage, leur amour de la nature a longtemps sauvegardé leur indépendance.