Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/298

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Tôt ou tard, cette industrie du flottage, actuellement reléguée dans les gorges des hautes montagnes les plus difficiles d’accès, aura cessé d’exister. Les routes et les chemins carrossables montent peu à peu du fond des vallées pour escalader les promontoires et pénétrer dans les cirques les plus élevés des monts ; les chemins de fer, les plans inclinés et tous les engins puissants inventés par l’homme viennent se mettre au service du bûcheron pour lui faciliter la tâche ; les forêts, assiégées par les cultivateurs, battent en retraite vers les cimes, et là où elles se maintiennent, là même où elles gagnent en étendue, elles prennent un aspect tout nouveau, car les arbres, au lieu de croître en liberté, sont plantés en quinconces à des distances régulières et poussent sous la surveillance de gardes forestiers qui les coupent avant l’âge. Nos descendants ne connaîtront plus que par tradition le flottage des bois, cette rude ébauche de la navigation, qui sans doute inspira aux sauvages ancêtres de Cook