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venezuela. — nouvelle-grenade

Délivrées de maîtres ou tuteurs étrangers, les républiques hispano-américaines en profitèrent rapidement pour développer leur commerce, désormais ouvert à toutes les nations européennes ; mais elles n’en restaient pas moins pénétrées des préjugés anciens, du vieil esprit théocratique des Aztèques et des Inca, à peine modifié par le régime de la monarchie cléricale qui avait sévi
Cabinet des Estampes.Bibl. Nationale
simon bolivar, 1783-1830
pendant trois siècles. Le changement le plus considérable produit dans les masses populaires provenait de la guerre d’indépendance où leurs diverses passions s’étaient exaltées, aussi bien l’amour du pillage et la férocité que l’audace et la vaillance. En outre, le libre contact avec des immigrants de toute origine devait élargir les esprits et préparer l’alliance future entre les hommes. Mais les républiques naissantes n’étaient pas encore prêtes à s’unir en cette grande fédération à laquelle les conduisaient les luttes communes récemment supportées, l’expérience de tribulations analogues, le souvenir des mêmes souffrances, l’usage d’une langue policée et la disposition géographique du continent, si bien équilibré dans ses contours, qui leur sert de demeure.

Le congrès de Panama, auquel Bolivar convia les républicains, les représentants des républiques hispano-américaines (1824), n’aboutit qu’à des échanges de politesse et à des résolutions sans portée : il était impossible que des populations encore barbares, comme l’étaient les descendants métissés des Muysca, des Quichua, des Aymara, des Araucans, pussent apprécier la valeur de l’union fédérale entre des