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peuples supprimés

bourg centralise les renseignements relatifs à la séismologie ; un palais doit s’élever à La Haye pour recevoir les « délégués de la paix », etc.

Outre les centres de travail qu’il importe de ne point déplacer afin de maintenir la régularité de la besogne, des lieux de rendez-vous, changeant d’année en année, ou suivant des périodes différentes, attirent les intéressés,
un enfant esquimau
savants, artistes, industriels ou autres, vers les contrées qui, suivant les époques et pour l’œuvre spéciale dont il s’agit, paraissent avoir la plus grande force d’attraction. Ces lieux de réunion deviennent en réalité, pendant quelques jours, les centres naturels où spontanément se porte la vie de l’humanité. Les congrès itinérants promènent librement sur la Terre leurs œuvres collectives.

L’espace grandissant, la plus savante organisation des ressources permettent à la population de s’accroitre indéfiniment d’année en année, de décade en décade, et chaque nouvelle évaluation faite par les ethnographes depuis le commencement du dix-neuvième siècle prouve qu’il y a augmentation notable. Et pourtant d’inutiles exterminations ont eu lieu, comme si la place manquait à l’homme ! Il est vrai que dans la série des tribus éliminées, on en compte plusieurs que l’on n’a point supprimées volontairement et qui sont mortes simplement par suite de leur impuissance à se faire au milieu nouveau. Les Européens sont accompagnés partout d’un cortège de maladies, terribles gardes du corps dont ils se servent parfois inconsciemment pour faire la place nette devant eux. Ils méritent le nom que leur donnent les Tineh de l’Amérique boréale, Ewie Daetlini, « ceux qui traînent la mort après eux »[1]. C’est ainsi que nombre d’insulaires océaniens ont disparu jusqu’au dernier, non qu’on les ait exterminés de propos délibéré, mais indirectement, par le milieu nouveau créé autour d’eux. De même, dans les régions boréales, l’arrivée de l’homme blanc a fait dépérir les autochtones. C’est ainsi que les Lapons russes de la péninsule

  1. Petitot ; Elie Reclus, Le Primitif d’Australie, pp. 371 et suiv.