Page:Reinach - Manuel de philologie classique, t. 2, 1884.djvu/15

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la physiologie, je représenterais que les divers aliments nécessaires à l'économie humaine ne doivent pas être ingérés tous à la fois : un cuisinier, si habile qu'on le suppose, ne peut pas se substituer aux sucs gastriques, non plus qu'un écrivain à la réflexion de ses lecteurs.

L'idée qui a présidé à la rédaction de ce volume est la même qui m'a fait entreprendre, il y a cinq ans, le Manuel de philologie classique dont il est le complément et la fin. J'ai voulu mettre à la portée de tous, condensé dans un petit nombre de pages, le fruit de plusieurs années de travail, dans l'espoir que ceux qui viendront après moi bénéficieront de mon labeur et s'épargneront une partie de la peine que le composition de ce Manuel m'a coûtée. Aujourd'hui que mon œuvre est terminée, je puis dire en vérité comme le poète : « Je l'ai fait sans presque y songer. » Voilà sept ans que je n'ai pas lu un livre ni une revue savante sans me demander quel profit je pourras tirer de ma lecture, soit pour compléter le Manuel, soit pour en préciser quelques données incertaines; et dans cette chasse ininterrompue aux documents sur le vaste champ de la philologie, la conscience du service que je pouvais rendre m'a seule préservé du découragement et de la fatigue. Par instants, je l'avoue, l'immensité de l'espace à parcourir m'a effrayé et le succumbam oneri de Tite Live m'est revenu sur les lèvres. J'ai pu craindre, et je crains encore, d'avoir accepté une tâche supérieur à mes forces. Mais qu'importe, si l'imperfection du résultat ne doit nuit qu'à la considération de l'auteur, sans porter atteinte à l'utilité du livre ? Quand un philologue prend le parti de céder intégralement au public tout l'arsenal de faits qu'il a péniblement rassemblés, il ne peut sans regrets ajouter à ce don gratuit le sacrifice de son amour-propre. Dans le présent volume, comme dans celui qui l'a précédé, la critique relèvera sans doute bien des inexactitude et bien des lacunes. Ces taches, si nombreuses qu'elles soient, n'empêcheront pas que le plus humble des étudiants ne puisse désormais savoir en six mois ce dont ses aînées, dans les circonstances les plus favorables, ont eu mille peines à s'informer en six ans. N'est-ce pas autant d'année dont il fera l'économie et qui s'ajouteront à son exis-