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CHAPITRE DOUZIÈME

vous ne savez donc pas que c’est cette trahison indigne qui a sauvé Venise et qui a causé au port de Trieste une perte d’un milliard ! Vous nous dictez des conditions, vous voulez qu’on vous rende vos canons. Eh bien ! il faut vous le dire, nous vous écraserons ; nous en avons le droit et le pouvoir ; nous en avons aussi la volonté, et nous le ferons. Nous irons à Turin, nous détruirons vos armées, vos arsenaux, vos places ; nous viderons vos caisses et brûlerons vos vaisseaux. Ce n’est pas l’Angleterre qui vous sauvera, car lord Palmerston, qui vous fait des promesses, n’est pas d’accord avec ses collègues, et la France a trop à faire chez elle. Le Piémont sera écrasé, et il l’aura bien mérité ! »

M. de Brück, naguère simple commis dans une maison de commerce, oubliait dans sa colère les égards dus à un vieillard de soixante-dix ans qui avait occupé dans son pays les plus hautes dignités.

Ministre de l’intérieur et ministre plénipotentiaire sous le roi Charles-Albert, le comte de Pralormo avait été depuis 1815 un des meilleurs serviteurs du Piémont : il connaissait à fond tout ce qui se rattache aux affaires intérieures et extérieures de ce pays. J’avais trouvé près de lui à mon arrivée à Turin, dans les circonstances difficiles où je me trouvais, le plus bienveillant appui.