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CHAPITRE QUINZIÈME

« Eh bien, Monsieur de Reiset, vous ne dansez pas ? Vous faites comme moi, vous êtes trop vieux pour danser. » À ce moment, la duchesse de Gênes qui dansait le cotillon s’approcha de lui, et vint le prendre par le bras pour faire un tour de valse. Tout le monde suivait des yeux ce couple de la maison royale, et on souriait de la danse du duc de Gênes qui faillit tomber deux ou trois fois. Quand la duchesse revint à sa place, elle m’aborda et me dit en riant : « Nous avez-vous vus danser ? Il faut avouer que Ferdinand danse bien mal. — Il me semble, en effet, répondis-je, que Son Altesse n’a pas grande habitude de la danse et qu’elle se conduit beaucoup mieux sur un champ de bataille. » La duchesse, continuant à rire, répliqua : « Non, il ne sait pas danser. Comment se fait-il que vous puissiez garder votre sérieux ? — Je ne me permettrais pas de rire de Monseigneur. — Je vous en donne la permission, car je ris bien, moi, de sa danse, et cela ne m’empêche pas de l’aimer beaucoup. » Cette boutade se termina par un éclat de rire auquel je pris part de bon cœur. Le bal fut plein de gaieté et se prolongea jusqu’à deux heures du matin.

Victor-Emmanuel témoignait pour les réceptions mondaines une grande antipathie. Les causes commençaient à en être connues. Son travail de nuit