Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/440

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s’y retirer pour fuir quelque mesure persécutrice des autorités d’Éphèse[1] ; soit que, revenant d’un voyage à Rome[2], et à la veille de revoir ses fidèles, il ait préparé, dans quelqu’une des cauponæ qui devaient border le port[3], le manifeste dont il voulait

  1. Apoc., 1, 9, en comparant vi, 9 ; xx, 4. Voir ci-dessus, p.353-354, et ci-après, p. 414 et suiv. L’idée d’un exil proprement dit (Tertullien, Præscr., 36) doit être écartée. Nous connaissons les îles qui servaient de lieu de déportation, Gyaros, Pandatarie, Pontia, Planasie. Patmos n’a jamais été de ce nombre. Les îles de déportation étaient choisies exprès parce qu’elles n’avaient ni port ni ville ; or Patmos a de très-bons mouillages (Guérin, p. 90-91, 94) et possédait une ville assez considérable. Gyare, par exemple, ne ressemble en rien à Patmos. La tradition ecclésiastique sur le bannissement de Jean à Patmos par Domitien renferme un anachronisme. — L’idée de solitude n’a non plus rien à faire ici. L’île était fort peuplée.
  2. L’entrée du port de Patmos est facile aux navires qui viennent de Rome et difficile à ceux qui viennent d’Éphèse. J’en fis l’expérience ; après un jour d’efforts, notre barque dut renoncer à franchir la passe.
  3. La grotte est une invention du moyen âge. À peine est-il nécessaire de faire remarquer que Apoc., i, 9-10, n’implique pas que l’Apocalypse ait été écrite à Patmos ; la nuance de ἐγενόμην indique plutôt le contraire. Telle fut, du reste, la défiance que l’Église grecque eut longtemps à l’égard de l’Apocalypse, que le faux Prochore (IVe siècle), racontant avec prolixité le séjour de Jean à Patmos, ne dit pas un mot de l’Apocalypse, et ne conduit Jean dans cette île que pour y écrire l’Évangile (manuscrit de Patmos, analysé par Guérin, op. cit., p. 27 et suiv., 34, 39 et suiv., 44 ; ce texte paraît le plus conforme au texte primitif ; comparez