Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/524

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Durant les trois premiers siècles, le sens général du livre se conserva, au moins pour quelques initiés. L’auteur du poëme sibyllin qui date à peu près de l’an 80, s’il n’a pas lu la prophétie de Patmos, en a entendu parler. Il vit dans un ordre d’idées tout à fait analogue. Il sait ce que signifie la sixième coupe. Pour lui, Néron est l’anti-Messie ; le monstre s’est enfui derrière l’Euphrate ; il va revenir avec des milliers d’hommes[1]. L’auteur de l’Apocalypse d’Esdras (ouvrage daté avec certitude de l’an 96, 97 ou 98) imite notoirement l’Apocalypse de Jean[2], emploie ses procédés symboliques, ses notations, son langage. On peut en dire autant de l’Ascension d’Isaïe (ouvrage du second siècle), où Néron, incarnation de Bélial, joue un rôle qui prouve que l’auteur savait le chiffre de la Bête[3]. Les auteurs des poésies sibyllines qui datent du temps des Antonins pénètrent également les énigmes du manifeste apostolique, et en adoptent les utopies, même celles qui, comme le retour de Néron, étaient décidément frappées de caducité[4].

  1. Carm. sib., IV, 117 et suiv., 137-139.
  2. Comp., par exemple, IV Esdr., iv, 35 et suiv., à Apoc., vi, 9 et suiv. ; IV Esdras, vii, 32, à Apoc., xx, 13 ; IV Esdr., x, 50 et suiv., à Apoc., xxi, 2 et suiv. Voir aussi IV Esdras, xv, 5.
  3. Asc. d’Isaïe, iv, 2 et suiv.
  4. Carm. sib., V, 28 et suiv., 93 et suiv., 105 et suiv., 142