Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/530

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tique antérieure, surtout à Ézéchiel, à l’auteur du livre de Daniel, aux deux Isaïes. Le Voyant chrétien est le véritable élève de ces grands hommes ; il sait par cœur leurs écrits, il en tire les dernières conséquences. Il est frère, moins la sérénité et l’harmonie, de ce poëte merveilleux du temps de la captivité, de ce second Isaïe, dont l’âme lumineuse semble comme imprégnée, six cents ans d’avance, de toutes les rosées, de tous les parfums de l’avenir.

Comme la plupart des peuples qui possèdent un brillant passé littéraire, Israël vivait des images consacrées par sa vieille et admirable littérature. On ne composait presque plus qu’avec des lambeaux des anciens textes ; la poésie chrétienne, en particulier, ne connaissait pas d’autre procédé littéraire[1]. Mais, quand la passion est sincère, la forme, même la plus artificielle, prend de la beauté. Les Paroles d’un croyant sont à l’égard de l’Apocalypse ce que l’Apocalypse est à l’égard des anciens prophètes, et cependant les Paroles d’un croyant sont un livre d’un véritable effet ; on ne le relit jamais sans une vive émotion.

Les dogmes du temps présentaient comme le style quelque chose d’artificiel ; mais ils répondaient à un

  1. Voir, par exemple, les cantiques des premiers chapitres de l’Évangile de Luc.