Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/564

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’empire allait se démembrer. Jésus, fils de Hanan, avait beau parcourir la ville en appelant pour la détruire les quatre vents du ciel ; à la veille de leur extermination, les fanatiques proclamaient Jérusalem capitale du monde, de la même manière que nous avons vu Paris investi, affamé, soutenir encore que le monde était en lui, travaillait par lui, souffrait avec lui.

Ce qu’il y a de plus bizarre, c’est qu’ils n’avaient pas tout à fait tort. Les exaltés de Jérusalem qui affirmaient que Jérusalem était éternelle, pendant qu’elle brûlait, étaient bien plus près de la vérité que les gens qui ne voyaient en eux que des assassins. Ils se trompaient sur la question militaire, mais non sur le résultat religieux éloigné. Ces jours troubles marquaient bien, en effet, le moment où Jérusalem devenait la capitale spirituelle du monde. L’Apocalypse, expression brûlante de l’amour qu’elle inspirait, a pris place parmi les écritures religieuses de l’humanité, et y a sacré l’image de « la ville aimée ». Ah ! qu’il ne faut jamais dire d’avance qui sera dans l’avenir saint ou scélérat, fou ou sage ! Un brusque changement dans l’itinéraire d’un navire fait d’un progrès un recul, d’un vent contraire un vent favorable. À la vue de ces révolutions, accompagnées de tonnerres et de tremblements, mettons-