Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/295

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Quant au cercle réduit des prosélytes aristocratiques, d’un goût littéraire médiocre, pour qui Josèphe composa son livre, la satisfaction dut y être entière. Les difficultés des vieux textes étaient habilement déguisées. L’histoire juive prenait l’allure d’une histoire hellénique, semée de harangues, conduite selon les règles de la rhétorique profane. Grâce à un étalage charlatanesque d’érudition, à un choix de citations douteuses ou légèrement falsifiées, on avait réponse à toutes les objections. Un rationalisme discret jetait un voile sur les merveilles trop naïves des anciens livres hébreux ; après avoir lu le récit des plus grands miracles, on restait libre d’en croire ce qu’on voulait[1]. Pour les non-israélites, jamais un mot blessant ; pourvu qu’on veuille bien reconnaître la noblesse historique de sa race, Josèphe est satisfait. À chaque page, une douce philosophie, sympathique à toute vertu, envisageant les préceptes rituels de la Loi comme un devoir pour les seuls israélites, et proclamant hautement que chaque homme juste a la qualité essentielle pour devenir fils d’Abraham. Un simple déisme métaphysique et rationaliste, une morale purement naturelle, voilà ce qui remplace la sombre théologie de Jéhovah. La Bible, ainsi ren-

  1. Voir surtout Ant., II, xvi, 5.