Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/32

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ment un morceau singulier, et qui tranche sur les lieux communs des autres épîtres attribuées à l’évêque d’Antioche. L’épître aux Romains tout entière est-elle l’œuvre du saint martyr ? On en peut douter ; mais il semble qu’elle renferme un fond original. Là, et là seulement, on reconnaît ce que M. Zahn accorde trop généreusement au reste de la correspondance ignatienne, l’empreinte d’un puissant caractère et d’une forte personnalité. Le style de l’épître aux Romains est bizarre, énigmatique, tandis que celui du reste de la correspondance est simple et assez plat. L’épître aux Romains ne renferme aucun de ces lieux communs de discipline ecclésiastique où se reconnaît l’intention du faussaire. Les fortes expressions qu’on y rencontre sur la divinité de Jésus-Christ et sur l’eucharistie ne doivent pas trop nous surprendre. Ignace appartenait à l’école de Paul, où les formules de théologie transcendante étaient bien plus de mise que dans la sévère école judéo-chrétienne. Encore moins faut-il s’étonner des nombreuses citations et imitations de Paul que présente l’épître d’Ignace dont nous parlons. Nul doute qu’Ignace ne fît sa lecture habituelle des grandes épîtres authentiques de Paul. J’en dis autant d’une citation de saint Matthieu (§ 6), qui, du reste, manque dans plusieurs traductions anciennes, et