Page:Renan - La Vie de Jésus.djvu/78

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tendre que le monde n’avait pas entendus jusque-là. Une forte tendance vers les questions sociales se fait déjà sentir ; des utopies, des rêves de société parfaite prennent place dans le code. Mélange de morale patriarcale et de dévotion ardente, d’intuitions primitives et de raffinements pieux comme ceux qui remplissaient l’âme d’un Ézéchias, d’un Josias, d’un Jérémie, le Pentateuque se fixe ainsi dans la forme où nous le voyons, et devient pour des siècles la règle absolue de l’esprit national.

Ce grand livre une fois créé, l’histoire du peuple juif se déroule avec un entraînement irrésistible. Les grands empires qui se succèdent dans l’Asie occidentale, en brisant pour lui tout espoir d’un royaume terrestre, le jettent dans les rêves religieux avec une sorte de passion sombre. Peu soucieux de dynastie nationale ou d’indépendance politique, il accepte tous les gouvernements qui le laissent pratiquer librement son culte et suivre ses usages. Israël n’aura plus désormais d’autre direction que celle de ses enthousiastes religieux, d’autres ennemis que ceux de l’unité divine, d’autre patrie que sa Loi.

Et cette Loi, il faut bien le remarquer, était toute sociale et morale. C’était l’œuvre d’hommes pénétrés d’un haut idéal de la vie présente et croyant avoir trouvé les meilleurs moyens pour le réaliser. La conviction