Page:Renan - Lettres du séminaire, 1838-1846.djvu/150

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encore se réunir à vous ! Comme il me témoigne une tendre affection, ainsi qu’à la chère Henriette ! Mon Dieu, il est vrai qu’il est bien dur d’être séparés quand on s’aime tant mais dites-moi, ma bonne mère, ne vaut-il pas mieux souffrir les tourments de l’absence et s’aimer, que d’être réunis de corps sans l’être de cœur ? Ne sommes-nous pas encore plus heureux que d’autres familles qui ne s’aiment pas et ont entre elles ces froids calculs d’intérêt que nous ne connaissons même pas ? Vous voyez donc que nous pouvons encore remercier Dieu, au milieu de nos peines. Je suis enchanté que vous ayez passé quelques jours à Lannion cela vous aura distrait, ma bonne mère. Je ne suis effrayé que quand je vous sais seule à Tréguier. Alors j’avoue que mon imagination s’alarme terriblement. 0 ma mère, moi aussi j’attends les vacances avec impatience pour vous voir, vous embrasser et reposer ma tête sur votre sein. Je ne les ai jamais tant désirées ; sans doute parce que je n’ai jamais été si longtemps sans vous voir. Voilà deux ans, ma bonne mère, que nous ne nous sommes vus. C’est bien