Page:Renan - Lettres du séminaire, 1838-1846.djvu/338

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Rome a été oubliée dans cette longue causerie, ma bonne mère ; c’est que tant de choses passent avant elle dans mon esprit et dans mon cœur D’ailleurs, je n’avais aujourd’hui en vous écrivant qu’un but et qu’un désir : c’était de mettre fin à vos incertitudes par le récit de la vérité, et de calmer vos craintes en vous assurant que rien ne les justifie. Le ciel récompenserait tous les sacrifices de ma vie en m’accordant le bonheur de réussir. J’espère tout de votre droiture, de votre jugement, de votre raison, et surtout de votre tendresse pour nous. Oh dites-moi que je ne me suis pas trompée !

Écrivez-moi toujours ici, chère maman, à la même adresse ; nous ne sommes pas près de quitter Rome, c’est-à-dire que nous y resterons certainement jusqu’au mois de mai. Ce voyage nous a épargné bien des peines, ma bonne mère, de bien tristes événements se passent dans le malheureux pays que j’habitais, et notre correspondance eût été à peu près impossible[1]. La Pologne ne m’a pas

  1. En 1846 eut lieu en Pologne une révolte des paysans contre la noblesse.