Page:Renan - Lettres intimes 1842-1845, calmann-levy, 1896.djvu/119

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connaître de ce qui peut troubler son repos. Sa tranquillité est le bien de ma vie. Dis-moi toujours ta pensée tout entière et sois sûr qu’elle ne sortira jamais de mon cœur. Écris-moi plus souvent, je t’en supplie ; j’ai besoin de lire dans ton âme, de me sentir encore et toujours ta première amie. Dans mes réponses, il m’arrivera sans doute, comme aujourd’hui, de te redire des choses que je t’aurai déjà exprimées plusieurs fois ; mais je ne te les répète que parce qu’elles occupent vivement ma pensée. Mon pauvre enfant ! Souviens-toi que, quoi qu’il arrive, tu as pour tout partager avec toi une sœur dont tu seras toujours l’affection chérie ! Reçois ce que je pourrai te dire comme étant dépouillé de tout sentiment personnel et dicté par le plus tendre intérêt, par le plus grand désir de te voir heureux. Heureux !… l’est-on sur cette terre de troubles et de douleurs !… Et sans compter les coups des hommes et du sort, ne trouve-t-on pas dans son propre cœur une source intarissable d’agitations et de misères ?…

Ce que tu me dis de ton goût pour les philosophes germaniques me fait plaisir sans