Page:Renan - Lettres intimes 1842-1845, calmann-levy, 1896.djvu/291

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en toi, pendant qu’il en était temps encore, les pensées qui ont déterminé ta résolution.

Ernest, pour trouver consolante ta situation du moment, songe au sort d’un honnête homme qu’un lien irrévocable oblige à enseigner, à imposer ce que sa raison et peut-être même sa conscience ne lui permettent pas d’admettre... Ce malheur pouvait être le tien ; puis-je trop remercier le ciel de t’en avoir préservé ? Sois donc courageux, ami ; oui, ta voie est épineuse, mais à chaque pas, comme à l’entrée, tu trouveras le cœur, la tendresse, l’appui de ta sœur, de ta première amie, de celle qui, après le souhait de te voir heureux, n’en forme pas de plus vif que de conserver une large part dans ton amitié. Que cette idée le soit chère ; que je retrouve toujours en toi ce que tu m’as donné jusqu’ici, et j’oublierai bien des larmes versées, et je retrouverai encore bien des espérances, bien des dédommagements dans l’avenir !

Ai-je besoin, mon Ernest, de te supplier de m’écrire, de te demander en grâce de m’envoyer ton adresse aussitôt qu’il te sera possible ? Si tu comprends mon affection, tu