Page:Renan - Lettres intimes 1842-1845, calmann-levy, 1896.djvu/356

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dessus des choses inénarrables, prétendant qu’il était absolument nécessaire pour moi de me trouver en rapport avec une femme bonne et aimable. J’en ris, mais non pas pour m’en moquer. Je me sens plus facilement vertueux et bon auprès de maman, et puis, sais-tu bien que tu me seras un jour nécessaire pour compléter ma vie morale et intellectuelle ! Il n’est pas bon à l’homme d’être seul ; mais est-il seul quand il a une sœur ? Sais-tu bien, bonne amie, que quand nous nous retrouverons, nous nous reconnaîtrons à peine, je dis en esprit ? Nous n’avons réellement fait connaissance que dans nos lettres. Observe beaucoup, et tu me diras ce que tu auras vu et senti ; moi je te dirai ce que j’aurai pensé, et cela fera une belle et douce vie.

Revenons au présent, bonne amie. Tu vois qu’il s’ouvre assez favorablement ; car les avantages des deux places dont je t’ai parlé se compensent si bien que, quelle que soit celle qui manque, je n’aurai aucun regret : je préfère pourtant, je te l’avoue, la première. Peut-être demain tout sera-t-il décidé ; peut-être, dans quelques jours, serai-je installé dans