Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/378

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ferons ce que nous pourrons : tel va être pour longtemps notre éternel refrain. La grande question est de savoir quelles dispositions nous rencontrerons à Rome. Les bibliothèques seront-elles rentrées sous la garde soupçonneuse du clergé ? La Propagande en particulier a-t-elle retrouvé ses anciens maîtres ? On raconte des faits inimaginables sur les entraves apportées autrefois aux recherches savantes par les scrupules de l’orthodoxie romaine. Nous fondons une partie de nos espérances sur quelque révolution diplomatique qui chasserait de Rome, ne fût-ce que pour quelques jours, les cardinaux, et remettrait les clefs en des mains françaises. Cela ne semble pas probable ; pourtant la politique suivie par le cabinet dans cette misérable expédition nous a ménagé assez de surprises pour que celle-ci ne soit pas tenue pour impossible.

Mes dispositions à l’égard de ce voyage sont toujours les mêmes. Pourtant, depuis ces derniers jours, j’y tiens un peu plus et je suis plus frappé des avantages qu’il présente. L’excellent accueil que j’ai reçu de l’Académie y est pour beaucoup. M. Quatremère pourtant m’a fait une assez vive opposition personnelle. On y a fait peu d’attention et lui-même s’est rallié, puisqu’une partie de mes instructions vient de lui. M. Littré est resté muet. T’ai-je dit que j’avais fait la connaissance de cet homme admirable, l’un de ceux qui, je crois, attireront le plus puissamment ma sympathie, et auront le plus agi sur moi, en me pré-