Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/476

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tuellement en face d’eux des barbares, en les domptant sans cesse, leur système est aussi absurde que celui de ces empereurs qui croyaient tout sauver en fortifiant les villes frontières, et en maintenant les peuplades envahissantes derrière le Rhin et le Danube. N’es t-il pas évident qu’à force d’être battus, ils finiront par triompher et miner les digues ? Et je comprends très bien pourtant que les hommes admirables de la génération qui nous a précédés, M. Thiers par exemple, qui en est le vrai représentant, ne comprendront jamais cela.

Mon départ de Rome, chère amie, est décidément fixé à samedi prochain, 20 avril. Je me suis décidé pour les vetturini. Nous serons une vraie caravane pour Bologne ; je m’arrêterai à Faenza, où il y a un service régulier pour Ravenne. Cette manière de voyager est bien longue, mais peu coûteuse et peu fatigante : on ne voyage que de jour, on s’arrête aux points intéressants, à la cascade de Terni, à Lorette, à Ancone, etc., on jouit du pays. Pour ce long trajet, en ne me demande que cinquante francs, y compris tous les frais d’hôtel. En supposant qu’il faille ajouter quelque chose pour plus de confortable, il n’y aurait rien d’exorbitant. J’ai cherché de toutes manières a organiser un itinéraire par Assise et Pérouse, point d’un si haut intérêt pour l’histoire de l’art et du développement italiens : il m’a été impossible de combiner un plan satisfaisant. La saison [est] excellente : la végétation restée jusqu’ici un