Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/503

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tôt possible, j’ai craint d’avoir sacrifié à ce désir un intérêt plus sérieux. Mais je me fie à la rectitude de ton jugement, qui aura su sans doute donner la prépondérance aux motifs qui la méritent. Je recevrai sans doute ta lettre à Padoue ; et si tu me rappelais, ô bonheur ! en une heure je serais de nouveau à Venise, et six heures après à Trieste.

Notre prochaine réunion, chère amie, absorbe toutes mes pensées. C’est un rêve pour moi, mais le plus doux des rêves. Dans quelques semaines, excellente sœur, dans quelques semaines, y penses-tu ? Pourquoi cependant ta lettre ne m’est-elle pas parvenue ? Cela m’inquiète ; car enfin il me semble que si tu avais été bien, tu m’aurais répondu tout de suite. Écris-moi souvent et partout ; je voudrais trouver ma route semée de tes lettres. Écris désormais à Milan et Turin ; aussi court que tu voudras, ce que tu pourras sans te fatiguer, quelques lignes au moins. Padoue est une triste ville, sans distinction intellectuelle. Que Bologne lui est supérieure ! Là j’ai trouvé sans contredit les esprits les plus distingués de l’Italie. Ici le béotisme est grand. L’Université est dans une déplorable décadence. Mais je trouve beaucoup de complaisance et d’égards. Saint-Antoine ne me plaît pas. Cet entassement de coupoles et de minarets n’a ni caractère ni unité ; et puis cette légende est lourde comme un pavé. Saint-Antoine fait, dit-on, trente miracles régulièrement par jour ; cela se peut, mais encore fau-