Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/364

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fondés sur l’examen des textes. Il n’y comprit rien, et son transcendant dut trouver ma précision bien terre à terre. Il n’avait aucune science ecclésiastique, ni exégèse ni théologie. Tout se bornait à des phrases générales, à des applications puériles des mathématiques à ce qui est « matière de fait ». L’immense supériorité de la théologie de Saint-Sulpice sur ces combinaisons creuses, se donnant pour scientifiques, me frappa bien vite. Saint-Sulpice sait d’original ce qu’est le christianisme ; l’École polytechnique ne le sait pas. Mais je le répète, l’honnêteté de M. Gratry était parfaite, et c’était un homme très attachant, un vrai galant homme.

Je me séparai de lui avec regret, mais je le devais. J’avais quitté le premier séminaire du monde pour un autre qui ne le valait pas. La jambe avait été mal remise ; j’eus le courage de la casser de nouveau. Le 2 ou 3 novembre 1845, je franchis le dernier seuil par lequel l’église avait voulu me retenir, et j’allai m’établir dans une institution du quartier Saint-Jacques, relevant du lycée Henri IV,