Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/352

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que pour les enfants d’Abraham. Jésus prétend que tout homme de bonne volonté, tout homme qui l’accueille et l’aime, est fils d’Abraham[1]. L’orgueil du sang lui paraît l’ennemi capital qu’il faut combattre. Jésus, en d’autres termes, n’est plus juif. Il est révolutionnaire au plus haut degré ; il appelle tous les hommes à un culte fondé sur leur seule qualité d’enfants de Dieu. Il proclame les droits de l’homme, non les droits du juif ; la religion de l’homme, non la religion du juif ; la délivrance de l’homme, non la délivrance du juif[2]. Ah ! que nous sommes loin d’un Juda Gaulonite, d’un Matthias Margaloth, prêchant la révolution au nom de la Loi ! La religion de l’humanité, établie non sur le sang, mais sur le cœur, est fondée. Moïse est dépassé ; le temple n’a plus de raison d’être et est irrévocablement condamné.

  1. Luc, xix, 9
  2. Matth., xxiv, 14 ; xxviii, 19 : Marc, xiii, 10 : xvi, 15 ; Luc, xxiv, 47.