Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/389

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pauvres arguments. Moïse, Christophe Colomb, Mahomet, n’ont triomphé des obstacles qu’en tenant compte chaque jour de la faiblesse des hommes et en ne donnant pas toujours les vraies raisons de la vérité. Il est probable que l’entourage de Jésus était plus frappé de ses miracles que de ses prédications, si profondément divines. Ajoutons que sans doute la renommée populaire, avant et après la mort de Jésus, exagéra énormément le nombre de faits de ce genre. Les types des miracles évangéliques, en effet, n’offrent pas beaucoup de variété ; ils se répètent les uns les autres et semblent calqués sur un très-petit nombre de modèles, accommodés au goût du pays.

Il est impossible, parmi les récits miraculeux dont les Évangiles renferment la fatigante énumération, de distinguer les miracles qui ont été prêtés à Jésus par l’opinion, soit durant sa vie, soit après sa mort, de ceux où il consentit à jouer un rôle actif. Il est impossible surtout de savoir si les circonstances choquantes d’efforts, de trouble, de frémissements, et autres traits sentant la jonglerie[1], sont bien historiques, ou s’ils sont le fruit de la croyance des rédacteurs, fortement préoccupés de théurgie, et vivant,

  1. Luc, viii, 45-46 ; Jean, xi, 33, 38.