Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/395

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Beaucoup de circonstances, d’ailleurs, semblent indiquer que Jésus ne fut thaumaturge que tard et à contre-cœur. Souvent il n’exécute ses miracles qu’après s’être fait prier, avec une sorte de mauvaise humeur et en reprochant à ceux qui les lui demandent la grossièreté de leur esprit[1]. Une particularité, en apparence inexplicable, c’est l’attention qu’il met à faire ses miracles en cachette, et la recommandation qu’il adresse à ceux qu’il guérit de n’en rien dire à personne[2]. Quand les démons veulent le proclamer Fils de Dieu, il leur défend d’ouvrir la bouche ; c’est malgré lui qu’ils le reconnaissent[3]. Ces traits sont surtout caractéristiques dans Marc, qui est par excellence l’évangéliste des miracles et des exorcismes. Il semble que le disciple qui a fourni les renseignements fondamentaux de cet Évangile importunait

    laient se faire tuer pour lui. Sa légende en quelque sorte courait devant lui et l’eût entraîné, si le gouvernement persan ne l’eût soustrait à l’influence de ses disciples. Cet homme m’a dit qu’ayant failli devenir prophète, il savait comment les choses se passaient, et qu’elles avaient bien lieu comme je les avais décrites dans la Vie de Jésus.

  1. Matth., xii, 39 ; xvi, 4 ; xvii, 16 ; Marc, viii, 17 et suiv. ; ix, 18 ; Luc, ix, 41 ; xi, 29.
  2. Matth., viii, 4 ; ix, 30-31 ; xii, 16 et suiv. ; Marc, i, 44 ; vii, 24 et suiv. ; viii, 26.
  3. Marc, i, 24-25, 34 ; iii, 12 ; Luc, iv, 41. Comp. Vie d’Isidore, attribuée à Damascius, § 56.