Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/417

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quand, au bout d’un siècle de vaine attente, l’espérance matérialiste d’une prochaine fin du monde s’est épuisée, le vrai royaume de Dieu se dégage. De complaisantes explications jettent un voile sur le règne réel qui ne veut pas venir. Les esprits obstinés qui, comme Papias, s’en tiennent à la lettre des paroles de Jésus sont traités d’hommes étroits et arriérés[1]. L’Apocalypse de Jean, le premier livre proprement dit du Nouveau Testament[2], étant trop formellement entachée de l’idée d’une catastrophe immédiate, est rejetée sur un second plan, tenue pour inintelligible, torturée de mille manières et presque repoussée[3]. Au moins, en ajourne-t-on l’accomplissement à un avenir indéfini. Quelques pauvres attardés qui gardent encore, en pleine époque réfléchie, les espérances des premiers dis-

  1. Irénée, Adv. hær.,V, xxxiii, 3, 4 ; Eusèbe, Hist. eccl., III, 39.
  2. Justin, Dial. cum Tryph., 81.
  3. L’Église grecque l’a longtemps rejetée du canon. Eusèbe, H. E., III, 25, 28, 39 ; VII, 25 ; Cyrille de Jérusalem, Catech., iv, 33, 36 ; xv, 16 ; Grégoire de Nazianze, Carm., p. 261, 1104, édit. Caillau ; Concile de Laodicée, canon 60 ; liste à la suite de la Chronographie de Nicéphore, p. 419 (Paris, 1652). Les Arméniens placent aussi l’Apocalypse parmi les livres dont la canonicité est douteuse. Sarkis Schnorhali, cité dans Exercice de la foi chrét., avec l’approbation du catholicos Nersès (Moscou, 1850, en arménien), p. 115-117. Enfin, l’Apocalypse manque dans l’ancienne version Peschito.