Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/457

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reine de Saba, ajoutait-il, se lèvera au jour du jugement contre les hommes de cette génération, et les condamnera, parce qu’elle est venue des extrémités du monde pour entendre la sagesse de Salomon ; or, il y a ici plus que Salomon. Les Ninivites s’élèveront au jour du jugement contre cette génération et la condamneront, parce qu’ils firent pénitence à la prédication de Jonas ; or, il y a ici plus que Jonas[1]. » Sa vie vagabonde, d’abord pour lui pleine de charme, commençait aussi à lui peser. « Les renards, disait-il, ont leurs tanières et les oiseaux du ciel leurs nids ; mais le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête[2]. » Il accusait les incrédules de se refuser à l’évidence. L’amertume et le reproche se faisaient de plus en plus jour en son cœur.

Jésus, en effet, ne pouvait accueillir l’opposition avec la froideur du philosophe, qui, comprenant la raison des opinions diverses qui se partagent le monde, trouve tout simple qu’on ne soit pas de son avis. Un des principaux défauts de la race juive est son âpreté dans la controverse, et le ton injurieux qu’elle y mêle presque toujours. Il n’y eut jamais dans le monde de querelles aussi vives que celles des

  1. Matth., xii, 41-42 ; Luc, xi, 31-32.
  2. Matth., viii, 20 ; Luc, ix, 58.