Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/470

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moyens d’action qui lui avaient si bien réussi dans le Nord avaient peu de prise. Ses disciples, en qualité de Galiléens, étaient méprisés. Nicodème, qui avait eu avec lui, dans un de ses précédents voyages, un entretien de nuit, faillit se compromettre au sanhédrin pour avoir voulu le défendre. « Eh quoi ! toi aussi, tu es Galiléen ? lui dit-on. Consulte les Écritures ; est-ce qu’il peut venir un prophète de Galilée[1] ! »

La ville, comme nous l’avons déjà dit, déplaisait à Jésus. Jusque-là, il avait toujours évité les grands centres, préférant pour son œuvre les campagnes et les villes de médiocre importance. Plusieurs des préceptes qu’il donnait à ses apôtres étaient absolument inapplicables hors d’une simple société de petites gens[2]. N’ayant nulle idée du monde, accoutumé à son aimable communisme galiléen, il lui échappait sans cesse des naïvetés, qui à Jérusalem pouvaient paraître singulières[3]. Son imagination, son goût de la nature se trouvaient à l’étroit dans ces murailles. La vraie religion devait sortir, non du tumulte des villes, mais de la tranquille sérénité des champs.

  1. Jean, vii, 50 et suiv.
  2. Matth., x, 11-13 ; Marc, vi, 10 ; Luc, x, 5-8.
  3. Matth., xxi, 3 ; Marc, xi, 3 ; xiv, 13-14 ; Luc, xix, 31 ; xxii, 10-12.