Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/487

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Son dogme terrible de la substitution des gentils, cette idée que le royaume de Dieu allait être transféré à d’autres, ceux à qui il était destiné n’en ayant pas voulu[1], revenait comme une menace sanglante contre l’aristocratie, et son titre de Fils de Dieu, qu’il avouait ouvertement dans de vives paraboles[2], où ses ennemis jouaient le rôle de meurtriers des envoyés célestes, était un défi au judaïsme légal. L’appel hardi qu’il adressait aux humbles était plus séditieux encore. Il déclarait qu’il était venu éclairer les aveugles et aveugler ceux qui croient voir[3]. Un jour, sa mauvaise humeur contre le temple lui arracha un mot imprudent ; « Ce temple bâti de main d’homme, dit-il, je pourrais, si je voulais, le détruire, et en trois jours j’en rebâtirais un autre non construit de main d’homme[4]. » On ne sait pas bien quel sens Jésus attachait à ce mot, où ses disciples cherchèrent des allégories forcées. Mais,

  1. Matth., viii, 11-12 ; xx, 1 et suiv. ; xxi, 28 et suiv., 33 et suiv., 43 ; xxii, 1 et suiv. ; Marc, xii, 1 et suiv. ; Luc, xx, 9 et suiv.
  2. Matth., xxi, 37 et suiv. ; Marc, xii, 6 ; Luc, xx, 9 ; Jean, x, 36 et suiv.
  3. Jean, ix, 39.
  4. La forme la plus authentique de ce mot paraît être dans Marc, xiv, 58 ; xv, 29. Cf. Jean, ii, 19 ; Matth., xxvi, 61 ; xxvii, 40 ; Act., vi, 13-14.