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les vacances de m. dupont

allées de verdure la traversaient, et des arbres d’agrément y formaient des bocages, s’efforçant encore d’y rappeler un parc. On devinait là aux dessins élégants des sentes, à l’essence des catalpas, des sycomores, des tulipiers, une splendeur abolie. Tout décelait l’abandon, et la forêt sans doute gagnait du terrain d’année en année, envahissant peu à peu les pelouses d’antan.

Au lointain, les montagnes levaient leurs fronts dénudés.

Deux grands bâtiments flanquaient le manoir, en retour vers les bois, des granges probablement. L’un avait été surélevé de moitié, la partie supérieure en était plus claire et l’on distinguait, dans le bas, des cadres de fenêtres maintenant remplis de maçonnerie. Le second s’adossait à d’autres constructions, celles de la ferme délaissée dont le spectacle serrait le cœur, tant il y avait là de lichens, de rouille et de moisissure. Dans la cour, quelque chose par terre attira mon attention : c’était une citerne, il y stagnait une eau perfide aussi verte que la margelle couverte de mousse.

Le silence impressionnait. Soudain, des pas réguliers sonnèrent sur le pavé : dans une écurie bâtie pour trente chevaux, Saurien, les oreilles découragées, montait une garde fantômale.