Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/106

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l’entendement, pour les opposer à un phénoménisme borné à des analyses dissolvantes, il a cru devoir poursuivre jusque dans l’absolu la fin de la raison, et cela en violation des concepts les plus décisifs de l’entendement lui-même.

C’est, on le voit, du principe de relativité que ressort le dilemme de la Substance, comme celui de l’Inconditionné. Il faut opter entre la méthode des relations et fonctions de phénomènes, et la méthode réaliste des notions abstraites ou symboliques, érigées en entités. L’hypothèse de l’existence réelle de la substance, ou des substances, relève de cette dernière méthode, soit qu’on les regarde comme des supports de qualités de telle ou telle espèce définie, — ou comme des puissances indéterminées d’où sortent par voie d’évolution des séries de propriétés et de modes, — ou qu’on réunisse tous les phénomènes de tout genre considérés comme les manifestations d’une essence unique, définie expressément pour les développer, — ou enfin que le noumène, un ou multiple, soit tenu pour absolument inconnaissable, et toutefois exerçant des actions dans le monde phénoménal. Dans tous ces cas également, il s’agit d’un sujet dont l’idée est obtenue par voie d’abstraction, que l’on pose comme réel, et que l’on définit par la négation de toute qualité qui pourrait servir à le définir, en même temps qu’on met des phénomènes dans sa dépendance.

Il ne faut pas dire que, sans être défini par l’espèce de la chose qu’il est en lui-même, il l’est néanmoins en tant que terme corrélatif de l’ensemble des produits phénoménaux dont on lui confère la puissance ; car il reste toujours lui-même la chose qu’on ne sait pas, qui a ce caractère négatif : que nulle relation intelligible,