Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/116

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divine, du principe inconditionné que posaient de deux différentes manières le Père des Idées de Platon et la Pensée de la Pensée d’Aristote, le néoplatonisme produisit une théorie de l’être éternel et nécessaire, qui s’imposa, avec les infinis, à la philosophie. Un dogme semblable s’introduisit en même temps dans la théologie catholique, où il dût s’allier à la croyance en un dieu personnel et créateur, avec un sens de la création qui était nouveau pour l’hellénisme.

La théorie de l’infini de Plotin réunit déjà les caractères d’un infinitisme théologique dont la scolastique devait faire son bien. Il y manque seulement la création, au lieu de l’émanation, parce que les hypostases s’engendrent successivement en descendant jusqu’au monde et dans la matière, sans s’abaisser à la connaissance de leurs produits. L’infini a deux emplois chez Plotin : il signifie l’illimité, sens négatif, comme dans la table pythagoricienne des oppositions, et aussi la perfection, sens positif attaché à la possession de qualités sans nombre. D’une part, c’est la matière qui est essentiellement l’infini. — Platon l’avait considérée sous cet aspect ; — mais, d’une autre part, l’infini existe dans le monde comme l’idée et comme l’archétype dont l’infini matériel est l’image et dont il reçoit l’ordre et les déterminations. Il procède de l’infinité et de la puissance éternelle de l’Un, n’étant de lui-même que non être, fantôme d’étendue, puissance des contraires.

L’Un, première hypostase, est au-dessus de l’être. Ce n’est pas à l’Un que l’éternité se rapporte, mais à l’Être intelligible qui vit perpétuellement, et, là même, elle est encore sans multiplicité et sans changement : vie universelle et actuellement infinie, toujours dans le présent, identique, immuable, contenant toutes choses à la