Page:Restif de la Bretonne - Mes inscripcions, éd. Cottin, 1889.djvu/38

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donné pour elles : « Hô comme il est des infortunés qui se privent du bonheur ! Je le sens mieux que personne (8 janvier 1788), en recevant les tendres soins de mes deux filles ! Puissent-elles être heureuses, et veuille le Ciel leur rendre un jour la double récompense de leur piété filiale[1] ! »


Aux deux grands chagrins de son existence, causés par sa femme et par son gendre, il faut en ajouter un troisième qui prenait une énorme importance à ses yeux : nous voulons parler des poursuites et des insultes des « poliçons » de l’île Saint-Louis qui, poussés peut-être par Augé, et certainement par le malin plaisir de tourmenter un vieillard d’étrange aspect, effaçaient ses inscriptions de dates sur les quais ! Le pauvre homme n’en dormait plus. Ses plaintes au commissaire de l’île ne produisaient aucun effet. Sa seule consolation était de les consigner sur ses cahiers, à côté de ses diatribes contre les ouvriers.

Ouvrier lui-même, il les connaissait mieux que personne et il avait le droit de les juger. Aussi quelle tristesse en voyant des anciens camarades abandonner leurs ateliers ! « Désolé contre les imprimeurs, s’écrie-t-il en 1788. Il n’est plus possible de faire travailler[2] … Aucun ouvrier ne travaille pour moi, aujourd’hui mercredi soir : le délire, la débauche, l’insubordination sont montés au comble[3] !… »

Puis il constate le mal qu’ont fait aux arti-

  1. Nuits de Paris, p. 2902.
  2. V. § 829, p. 240.
  3. V. § 878, p. 255.