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Page:Restif de la Bretonne - Monsieur Nicolas, t. 3, 1883.djvu/170

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1752 — MONSIEUR NICOLAS

ville où j’étais en apprentissage, sont les plus grands jacteurs de tous les Français ; qu’ils se vantent beaucoup plus de ce qu’ils n’ont pas, que de ce qu’ils ont obtenu. Ma réponse parut si extraordinaire à Breugnot, qu’il en conjectura que j’étais heureux. D’après cette idée, ne pouvant se vanter en son nom, à cause du chanoine Joson, son tuteur, il se vanta au mien, et dit à ses connaissances, à Mme Minon, à tout le monde enfin, que j’étais possesseur des charmes de la belle Baron l’aînée. Ces bruits ne tardèrent pas à venir aux oreilles de Mme Parangon, par sa sœur.

Un soir que je sortais après souper, suivant mon usage, depuis que je voulais faire ma cour à l’une où l’autre de mes jolies voisines, je trouvai Mme Parangon sur la porte coupée de la boutique. — « Vous sortez ? — Oui, Madame ; à moins que… — En effet, j’ai à vous parler… » Je m’approchai d’elle en silence. Elle me fit signe de la suivre dans la salle, et de m’asseoir. — « Ce que j’ai à vous dire me fait de la peine ! Comment un jeune homme élevé par d’aussi honnêtes parents que les vôtres ; qui a montré, depuis son arrivée ici, envers Aimée, envers Tiennette, des sentiments distingués, s’oublie-t-il lui-même, au point de se permettre ce qu’on ne pardonnerait pas aux fats les plus corrompus ? — Madame, j’ose vous assurer d’avance que je suis calomnié auprès de vous ! — Qu’avez-vous dit à Breugnot, dimanche, à l’instant où Mlle Baron, une fille aimable, pleine de mérite,