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la provinciale
LE RAT DE BIBLIOTHÈQUE[1]

En l’arrière-automne de l’an 19…, le professeur Fulai, qui appartenait à l’état-major de la haute culture, était quelque peu préoccupé.

Monsieur Sigismond Fulai était encore un homme imposant, de santé régulière ; ses dents, régulières aussi, souriaient avec grâce et condescendance. Encore que sa tête enfermât une bibliothèque, il y avait chez lui une autre bibliothèque également bien ordonnée, au premier étage au-dessus de l’entresol, côté jardin, elle avançait toute droite, avec un majestueux balancement. Sa voix était calme et douce, sa peau soigneusement rasée, ses élégantes bottines craquaient, et Baptiste les entretenait toujours brillantes.

Baptiste, c’était le nom de son domestique, qui travaillait aux fiches avec son plumeau ; il avait fini par reconnaître les livres de la bibliothèque à leur reliure.

En l’arrière-automne de cette année donc, pour des causes restées inconnues, les rats avaient envahi la bibliothèque (celle du premier étage au-dessus de l’entresol, côté jardin). Et c’était là une chose inquiétante.

  1. Voir aux Remarques, à la fin du numéro.