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ANDRÉ GIDE

Il y a une légende d’André Gide ; et il est naturel que l’hommage rendu à un si fluide génie ait d’abord été de l’imagination et de la sensibilité. Mais le temps est venu où la sèche intelligence réclame aussi sa part et les études que l’on multiplie au sujet d’un écrivain qui n’est pas seulement un charmeur se font de plus en plus serrées. On se rend compte qu’il ne suffit pas selon l’heure et l’humeur de s’abandonner aux délices des Nourritures Terrestres, de la Porte Etroite ou des Caves du Vatican, et que leur auteur, pour être compris, veut un examen d’ensemble.

Lui-même d’ailleurs par la présentation de son œuvre en pages qu’il prit soin de choisir, de rassembler, invite à découvrir que sous l’arabesque la plus légère, la plus fuyante, elle cache un dessein grave et soutenu, que tant de complexité ne lui ôte pas son unité, que ses variations ont un sens, dessinent une courbe, trahissent une évolution. Le volume des Morceaux Choisis a le poids d’une publication originale. Outre que des pages inédites dont la signification n’échappera à personne y jalonnent les récentes étapes de la pensée de l’écrivain, outre qu’il s’y révèle par l’extérieur et pour le public, on a l’impression aussi d’un recueil inté-