Page:Revue de Paris, 40è année, Tome IV, Juil-Août 1933.djvu/461

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qui a mené ensemble la vie du poète et la vie du prêtre, sans que rien de l’une périclitât par l’autre, aire favorisée de contrastes, à la fois parnassien et symboliste, franciscain et vivant robuste, chrétien de goût et de foi, païen de sensibilité, et qui n’a pas plus choisi entre les beautés créées que Dieu lui-même ne l’a fait en les créant toutes.

L’école de Coppée, comparée au cirque des funambules et au jardin académique des penseurs, paraît une école plutôt primaire. Elle compte pourtant un inspecteur général de l’Université, Eugène Manuel, auteur des Poésies de l’École et du Foyer, dont la Robe et autres récits sentimentaux à douze pieds ont trop sévi sur notre enfance pour que nous puissions en parler ici avec l’impartialité qui sied au disciple d’Aristarque. Le nom de Jacques Normand vous dit-il quelque chose ? Je crains que non. C’est pourtant le meilleur élève de Coppée. La Gervaise peut, à droite d’une pendule, faire pendant au Naufragé. Les titres des recueils de Normand À tire-d’aile, les Moineaux francs, les Visions sincères sont interchangeables avec ceux de Coppée. Ses Écrevisses furent célèbres :

J’aurais voulu que tu la visses,
Mangeant des pattes d’écrevisses
En cabinet particulier.

Ne sont-elles pas les cousines germaines du petit homard des Batignolles, que mange une grisette qui, entraînée chez Brébant par un galant dangereux,

D’un unique homard avait fait trois heureux,
Car elle avait gardé les pattes pour sa mère.

Au fait, le petit homard des Batignolles est-il bien de Coppée ? La parodie qui a abondé autour de lui, voilà sans doute un des produits gais, vivants de son école. Mais entre ses disciples plus respectables, n’oublions pas les poètes patriotiques. Si Coppée a écrit la Lettre d’un Mobile breton, les premières poésies de Jacques Normand seront les Tablettes d’un Mobile. Le légendaire bonnet à poil de Coppée est exactement dans la tradition de Béranger, poète de Paris. Et si, vous souve-