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LA REVUE DE PARIS

jour fut porté au Résident. Et, le Résident n’ayant pas admis ces revendications, la Chambre d’Agriculture tint le jour même une seconde séance et vota une seconde motion qui se terminait ainsi : « La Chambre estime que, si le Gouvernement veut transformer la Conférence consultative en Assemblée politique, les principes démocratiques et la loyauté lui créent le devoir d’appliquer intégralement le suffrage universel sans catégories ni d’électeurs ni d’éligibles. »

Cet ultimatum, qui posait l’alternative du tout ou rien, déplaçait la question, la portait sur le terrain politique et rendait toute réforme impossible en proposant une solution extrême qu’on était à peu près sûr de voir rejeter à Paris. Proposer le suffrage universel direct, sans catégories d’électeurs ni d’éligibles, c’était donner à la réforme projetée un caractère politique, et même révolutionnaire, qui ferait tout échouer. Et, de fait, la manœuvre réussit ; elle a abouti à l’ajournement de la réforme et au maintien provisoire du statu quo.

L’Agriculture et le Commerce continuaient de se constituer en « ordres » distincts. La Tunisie française, journal de la Chambre d’Agriculture, déclarait que « les agriculteurs avaient le droit de n’être représentés que par leurs pairs ». Le Promeneur protestait que « les intérêts agricoles et commerciaux ne voulaient pas être représentés par des élus qui n’appartiendraient pas à leurs catégories ». Toute fusion avec le Troisième Collège était hautement répudiée. Il était impossible que le Troisième Collège ne répondît pas aux déclarations exclusivistes des groupes privilégiés. Et ce ne fut pas, cependant, le Troisième Collège qui répondit. La protestation fut faite au nom de « tous les groupes républicains de la Régence », réunis en assemblée plénière, qui réclamèrent le suffrage universel direct, sur une liste électorale unique, sans distinction de catégories d’électeurs ou d’éligibles.

La question ainsi posée, il était inévitable que le Protectorat en pâtît. En de semblables luttes, le premier mouvement des partis est d’appeler à leur aide les influences et les pouvoirs de la métropole. En querelle avec M. Millet, la Chambre d’Agriculture avait provoqué l’immixtion parlementaire, l’intervention de la Commission du budget. Aujourd’hui, c’est