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continentale. Le débat se généralisa ; deux camps nettement opposés se formèrent, et les plus hautes personnalités du monde militaire en France exposèrent publiquement leurs opinions sur les procédés tactiques à employer, — en attendant qu’une guerre, menée dans des conditions moins particulières, permit de conclure avec quelque certitude.

Cette guerre se poursuit aujourd’hui dans les plaines de Mandchourie. Les armées russe et japonaise posséderont bientôt des effectifs égaux à ceux que mettrait en présence une rupture entre les plus grandes puissances militaires de l’Europe. Pendant l’année qui vient de s’écouler, les contingents, faibles au début, ont atteint progressivement une force numérique qui peut suffire à l’étude de tous les problèmes de tactique : aux batailles de Liaoyang et du Cha-Kho, il y avait 300 000 hommes sur le terrain ; ce chiffre n’avait été atteint dans aucune campagne antérieure. D’autre part, le théâtre de la guerre est un pays cultivé sur toute sa surface, couvert de nombreux villages, offrant d’importantes ressources en approvisionnements de toutes sortes ; cela ne nous écarte pas non plus des conditions d’un conflit européen. Les armées belligérantes sont recrutées, instruites, réglementées de la même manière que celles de la France et de l’Allemagne. Si la race japonaise diffère de la nôtre, du moins l’éducation militaire tend à rapprocher ses soldats de ceux des peuples européens que le Japon a choisis pour modèle.

Tous ces caractères concourent à donner aux opérations russo-japonaises un intérêt technique de premier ordre. Cette guerre sera fertile en enseignements certainement utiles, peut-être même définitifs. L’objet de la courte étude qui va suivre est de rappeler brièvement les théories émises depuis la guerre sud-africaine, et de mettre en regard les procédés de la campagne actuelle. L’auteur de ces quelques pages n’a nullement la prétention de présenter des conclusions ni même d’émettre une opinion sur la question en litige ; mais il a eu la bonne fortune de suivre de près une partie des opérations de l’armée japonaise, notamment sur le champ de bataille de Liaoyang, et il se borne à décrire ce qu’il a vu. Dans les nombreux ouvrages qu’ont inspirés les surprises de la guerre sud-africaine, presque toutes les questions inté-